Par Square Enix, le 17 décembre 2009, sur PlayStation 3 et Xbox 360 – Dernière fantaisie en date de Square Enix, Final Fantasy XIII est avant tout le premier épisode HD de la série, si l’on excepte, bien sûr, la mouture Xbox 360 de Final Fantasy XI Online et les deux ou trois Blu-Ray qui sortent par-ci par-là. Un titre très attendu, donc, et annoncé en grande pompe dans le cadre d’un projet d’envergure : Fabula Crystal Novallis, qui semble s’être égaré en chemin, mais ce n’est pas l’affaire du jour. Final Fantasy XIII n’a pas forcément reçu la bénédiction des joueurs ni de la presse, la faute à une linéarité trop prononcée. Il n’en reste pas moins un jeu vidéo auquel on joue avec une envie frénétique de progresser et qui devient, au fil des heures, littéralement hypnotique.

Square Enix Pictures Presents…

On a cru que Square Enix s’était (enfin) racheté une conduite. Dans Final Fantasy XII, entre les scènes cinématiques, il y avait du jeu vidéo, du vrai, avec de l’exploration, des quêtes et des tas de choses à faire. Mais c’était sans compter sur ce treizième épisode. Rares sont les RPG à être aussi dirigistes et linéaires que ce Final Fantasy XIII, et ce, dans tous les compartiments de l’expérience de jeu. Que ce soit dans l’exploration, où on ne va, pour ainsi dire, pas par quatre chemins. On avance tout droit dans un long couloir richement décoré et entrecoupé de cinématiques toutes les cinq minutes. Le système d’évolution est tristement linéaire lui aussi : c’est une sorte de sphérier où on n’a pas le choix de l’orientation qu’on donne à ses personnages. L’équipement lui-même n’a que deux possibilités : une arme et un accessoire, même si on obtiendra la capacité à équiper des accessoires supplémentaires. À côté de ça, on n’a pas de carte du monde, pas de village à visiter, pas de donjon non plus à plier, rien de ce qui caractérise un RPG japonais. Ça fait peur, dit comme ça, mais il y a quand même un fond de jeu, nous y reviendrons.

Le plus surprenant dans ce titre est à mon humble avis le scénario. Final Fantasy XIII nous raconte l’histoire d’un monde, Cocoon, où des êtres supérieurs, les Fal’Cie, transforment des hommes et des femmes en L’Cie, c’est-à-dire qu’ils leur attribuent une tâche qu’il faut accomplir, sous peine d’être transformé en monstre hideux. La réussir, par contre, transforme le L’Cie en cristal, pour l’éternité. C’est, au moins, un peu plus noble. Mais les Fal’Cie de Cocoon ont, hélas, des ennemis : les Fal’Cie et l’Cie de Pulse, un autre monde. Et quiconque est entré en contact avec un être de Pulse est sans cérémonie déporté sur l’enfer de cette planète, justement. Et comme l’être humain a un esprit rebelle, le groupe du héros va tenter de renverser l’ordre des choses. Voilà, grosso modo, ce qui va servir de fil rouge à FFXIII. Je simplifie bien volontairement, car vous aurez à loisir de découvrir tout ça sur la cinquantaine d’heures de jeu de votre partie. Le scénario est étonnamment mature (étonnamment car la brochette de personnages qui servent de héros oscille entre le ridicule et le détestable), les thématiques se développent intelligemment et on s’attache à l’univers. La mise en scène est, forcément, en permanence réussie et le rythme est soutenu. Il n’y a pas beaucoup de temps mort dans l’histoire, ni même dans le jeu, si ce n’est le chapitre 11 qui redonne du mordant à une belle progression. Et c’est incroyable, à côté d’une telle maîtrise de la narration, de voir des personnages aussi clichés, creux et vidés de tout intérêt. En même temps, on parle d’un RPG japonais, et c’est aussi ce qu’on y cherche, mais tout de même ça fait un peu pitié, entre Snow, le grand blond de Gad Elameh de la bande et Vanille, la petite fille enjouée doublée par une hardeuse. Le casting est vraiment discutable, surtout après avoir eu la chance de côtoyer des gens comme Balthier dans FFXII.

Carte postale

La mise en scène n’aurait sans doute pas eu le même impact sans une réalisation d’un tel niveau. Le jeu a le bon goût d’offrir, en permanence, une foule de détails graphiques et des décors riches et variés. Bon, on aurait préféré les visiter ces décors, mais au moins, la patte graphique de Square Enix est là. Les scènes cinématiques sont toutes plus impressionnantes les unes que les autres, Blu-Ray ou pas, et la différence entre celles-ci et le moteur du jeu se fait tout en douceur. Les modélisations sont fines, les menus sont propres, et les effets spéciaux sont admirables. C’est un quasi-sans faute. Quasi, oui, car l’animation est lamentable. On pourrait adresser la même critique à FFXIII qu’à Pro Evolution Soccer : le jeu est diablement joli, mais il est le contre-exemple parfait d’une animation crédible. Oh, pas celles des cinématiques, bien sûr, mais in game, les personnages courent dans le vide (même si le verbe courir n’est pas non plus le plus approprié à Vanille) et l’intégration avec l’environnement est une calamité. On a l’impression de faire un bond de dix ans en arrière, de ce point de vue. Ça fait vraiment tâche, au final. C’est un pavé dans la mare. Le jeu est donc très beau, mais il ne faut pas qu’il bouge.

D’un point de vue dans la bande sonore, c’est également en dents de scie. La totalité des dialogues sont doublés, aussi bien sur PlayStation 3 que sur Xbox 360, et c’est vraiment agréable. Les doublages américains sont de bonne facture, même si, j’en ai parlé plus haut, la doubleuse de Vanille a complètement craqué (coquine, va). Par contre, les musiques oscillent, à l’image du jeu tout entier, entre l’excellent et le médiocre. C’est vraiment difficile de jauger la qualité de la bande originale parce que certains thèmes sont mémorables, que ce soit la musique des combats ou celle de l’affrontement contre Barthandelus. À côté de ça, on a aussi pas mal de morceaux de remplissage complètement aseptisés, histoire de meubler, mais aussi des pistes à côté de la plaque. Globalement, je préfère en retenir, les dents grinçantes malgré tout, que certains morceaux sortent vraiment du lot et font honneur aux précédentes productions.

La dynamique des combats

Heureusement, et comme d’habitude, on est en présence d’un système de combat au point. C’est devenu une tradition depuis quelques épisodes, on repart de zéro pour créer une mécanique de jeu inédite. Dommage pour tous ceux qui avaient adoré la gestion des gambits. Le système de combat, donc, repose sur une gestion intelligente des stratégies. Sachez, tout d’abord, que vous ne contrôlez qu’un personnage, le vôtre, les deux alliés sont contrôlés par l’I.A. et adoptent un comportement propre à leurs rôles. Le leader est de toute façon semi-automatisé et son contrôle va, en grande partie, consister à appuyer sur A pour lancer automatiquement des attaques ou des sorts et à déclencher une technique spéciale, nous y reviendrons. On part donc à la bataille avec trois personnages. On va créer une liste de six stratégies : pour chaque stratégie, on va définir les rôles de chacun. En clair, on va donc faire une stratégie où les trois attaquent, par exemple, ou une stratégie où un allié va soigner pendant que vous lancerez des sorts de soutien. C’est dans le choix des bonnes stratégies, mais pas seulement, que va résider la qualité des combats. Pas seulement, car le jeu ne cesse de s’appuyer sur la tension du seuil de choc. En clair, tous les ennemis ont une jauge de choc, qui grâce à certaines attaques, va augmenter. Une fois en état de choc, l’ennemi devient plus vulnérable, et on peut lui lancer certains sorts auxquels il est, jusqu’alors, immunisé. C’est cette mécanique, cette tension qui va rendre efficace tout le système, puisqu’il va falloir avoir une fine connaissance des faiblesses et résistances de chaque ennemi et adopter son style. À côté de ça, on a également des invocations et des techniques qui consomment des PT (points de technique). Rien de très intéressant, du côté des chimères, et on préfère finalement garder les PT pour autre choses (acuité, soins sur toute l’équipe, des choses comme ça).

Chaque personne, vous vous en doutez, a des rôles prédéfinis. Là où le système d’évolution est intéressant, c’est qu’il n’y a plus de points d’expérience, mais des points de capacité. On va les dépenser petit à petit pour acheter des attributs sur le cristarium (PV+20, Attaque+100) ainsi que des sorts (soin², protection, etc.). Donc, en faisant évoluer le rôle de soigneur de Hope, par exemple, on finit par débloquer des techniques plus poussées, qu’il utilisera en combat. C’est de ce point de vue que le système d’évolution devient réellement hypnotique : tous les trois ou quatre combats, on se retrouve sur le cristarium à distribuer des points de compétence. Les personnages qui ne participent pas au combat gagnent également ces fameux PC. Il est, enfin, aussi possible de faire évoluer ses armes et accessoires, en les forgeant à certains objets. Il est même possible de les transformer, mais cela reste très hasardeux, puisqu’on ne sait pas à l’avance le résultat d’une fusion.

Et au bout du couloir, la lumière

Je prends le risque de gâcher la surprise à moult joueurs. Je ne peux pas ne pas évoquer le onzième chapitre de l’aventure, qui transforme littéralement Final Fantasy XIII. Je vous ai parlé d’un jeu linéaire, dirigiste voire trop cinématique. Pourtant, au bout de vingt heures de jeu environ, la donne change. On arrive à un point où on se retrouve sur une plaine géante, dans un monde ouvert, où la flore et la faune règnent en maîtres. Il faut alors faire quelques heures de level up, en réalisant des quêtes, pour poursuivre l’aventure tant un mur de difficulté se présente face à vous. Voilà, à partir de ce point, le jeu devient littéralement hypnotique. C’est maintenant, qu’on s’intéresse à l’évolution de ses personnages, qu’on choisit l’équipe que l’on veut, que le jeu devient un véritable jeu. On met de côté l’aventure, ce long couloir, pour se plonger dans une cinquantaine de quêtes annexes à réaliser. Il s’agit, le plus souvent, de localiser un ennemi sur la carte de se le farcir, mais ça change tellement l’expérience qu’il est difficile de passer à côté. Cette partie du jeu a d’ailleurs des airs de Shadow of the Colossus, avec ses monstres géants, sa faune, sa terre maudite, ses ruines. On décroche littéralement de l’histoire pendant plus d’une dizaine d’heures, pour faire une traversée du désert enrichissante et vraiment impressionnante, d’un point de vue ludique.

Finalement, ce sont ces paradoxes qui caractérisent Final Fantasy XIII. C’est un jeu où se côtoient le pire et le meilleur, à l’image de la saga entière, d’ailleurs. Il est difficile de se faire un avis sur les premières heures. Il est d’ailleurs aussi difficile de se faire un avis sur la dernière partie du jeu uniquement, puisqu’il ne faut pas oublier que l’excellence n’arrive qu’après plus d’une vingtaine d’heures de jeu. Mais au final, on se retrouve avec un épisode maîtrisé, complet et équilibré, ce que ne laisse pas présager les premiers pas dans le monde de Cocoon. Mais ce qui assure la qualité du titre est son aspect hypnotique, je le répète. On finit par avoir une envie folle de faire progresser ses troupes, d’optimiser ses stratégies et d’enchaîner les quêtes, jusqu’à pas d’heure. La preuve d’un jeu vidéo d’excellente qualité, à mon avis.